I
DE QUOI PARLE-T-ON ?
Interrogés sur la confiance en soi, nous avons tous des réponses. Nous savons ce qu'est la confiance et ce qu'est le manque de confiance en soi. Certaines de nos idées sont vraies, elles reflètent notre vécu, d'autres ne sont que des préjugés, des croyances non seulement erronées mais qui contribuent à miner notre assurance. Notre imaginaire construit un monde autour du concept de confiance, un monde dont nous sommes le plus souvent exclus. Idéalisant la confiance, elle nous devient inaccessible.
Faute d'autres mots à poser sur ce qui se passe en nous, nous nommons « manque de confiance » des réactions tout à fait normales. Un problème ? un échec ? « Je manque de confiance en moi. » L'aveu est là, tellement prompt à expliquer la situation qu'on est en droit de se demander s'il ne cache pas autre chose. La phrase est avancée telle un mantra protecteur... Y trouverions-nous des bénéfices ?
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En êtes-vous si sûr ?
Dressons le portrait imaginaire d'Albert, un homme qui a confiance en lui. Quels sont ses attributs ? Tout d'abord physiquement, il est plutôt beau, grand, athlétique, séduisant. Il est habillé avec goût, ce qui ne gâte rien. Il est riche parce qu'il a réussi. Il réussit tout ce qu'il entreprend. Il a une place en or et de toute façon n'aurait pas de difficulté à trouver du travail. Tout le monde veut travailler avec lui, il est tellement compétent et efficace ! Il sait où il va, prend aisément les bonnes décisions. Sa confiance en lui dégage une véritable aura qui séduit. Il plante ses yeux dans les vôtres avec assurance, il vous serre la main d'une poigne ferme. Il affronte toutes les situations et ne craint rien ni personne. Très à l'aise dans les relations, tant en petit comité qu'en groupe, il se sort des pires situations par une pirouette. Il est intelligent et tellement cultivé : il a toujours quelque chose d'intéressant à dire. Ses réflexions sont pertinentes, pleines de bon sens. Il a une belle maison, une femme sublime.
Bertrand lui est plutôt malingre, voire chétif. Mal fagoté dans un habit trop grand, le cheveu gras, personne ne le désire à ses côtés. Heureusement, il doit en avoir conscience et reste la plupart du temps en retrait. Regard fuyant, mains moites et poignée molle, il est décidément peu amène. Inhibé en public et paralysé face à sa hiérarchie, il est employé à un poste en deça de ses compétences. Il gagne peu mais s'en contente. Il travaille pourtant assidument : il faut dire qu'il est plus lent que ses collègues, mais il est toujours prêt à faire plus, à rendre service. Discret, il reste penché sur ses dossiers, on entend peu sa voix dans les bureaux. Malgré son ancienneté, on ne lui a jamais proposé de poste supérieur. Il est mal à l'aise en groupe mais aussi dans les conversations plus intimes. C'est tout juste s'il ose manger avec ses collègues à la cantine. Il habite seul un F2 simplement meublé.
Ces deux caricatures reprennent nos clichés. Nous sommes bardés d'a priori tels que : « Quand on a confiance en soi, on réussit tout ce qu'on entreprend ! » ou encore : « Quand on a confiance en soi, on est à l'aise partout et en toutes circonstances ! »
Quand on a confiance en soi...
En êtes-vous si sûr ? Toutes sortes de mythes entourent la confiance en soi. En fait, plus on en manque, plus on l'idéalise. Quand on éprouve quelque difficulté devant un choix, on se dit par comparaison que les autres, eux, savent ce qu'ils veulent. C'est une certitude pour nous, les autres ne font pas face au doute, eux savent décider et choisir. Eux sont à l'aise partout et en toutes situations et n'éprouvent aucune peur !
Chacun se croit volontiers différent, seul à être affligé de ce défaut de confiance. Autour de nous, à part peut-être une ou deux personnes particulièrement émotives, nous ne voyons qu'assurance et aisance. C'est une conviction : « Les autres ont la vie plus facile. » Nous savons parfaitement cette assertion fausse, mais, paradoxalement, nous y croyons !


C'est un fait, tout le monde doute. Seuls ceux pour qui les autres n'existent pas ne se posent jamais de questions. Tout le monde hésite devant une importante décision à prendre. Tout le monde tremble devant la nouveauté et la mise en jeu de ses compétences. Tout le monde craint plus ou moins de ne pas être aimé. Et tout le monde a, au moins une fois dans sa vie et souvent davantage encore, rencontré des échecs, fait des erreurs, été trahi, vécu des situations de rejet, d'humiliation... Confiance en soi n'est pas synonyme de beauté, facilité, absence de crainte et succès assuré. Le premier bénéfice d'une psychothérapie en groupe est d'ailleurs cette découverte, stupéfiante pour certains, et combien source de soulagement : « Je ne suis pas seul à ressentir ce que je ressens. » Oui, les autres éprouvent les mêmes émotions. Ils vivent les mêmes peurs, plus ou moins violentes, bien sûr, selon l'histoire de chacun, mais globalement, les mêmes émois affectent nos semblables.