« Je veux désormais marcher à mon pas, je
ne veux que quiconque brise mon élan, j’ai
tranché mes anciens liens avec autrui et avec
le temps. Devrais-je me taire ? Non. »

Élizabeth Herrgott, L’inavouable, Paris, Éd.
Cercle Poche, 2008

 

« Mais le passé est une chose qui, lorsqu’il
a planté ses dents dans votre chair, ne vous
lâche plus. »

Jonathan Littell, Les Bienveillantes Menuet
(en rondeaux), Paris, Gallimard, 2006

 

À la mémoire de Sarah Kaliski

 

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Zone X ? « Free-Sex » ? Cliquez ici ! DVD, vidéos de cul complètes en cours de chargement... « Loading »... 96 %... Le « streaming » sur le Net aurait-il mis par terre l’industrie du porno, les peep-shows, les sex-shops, la fantasmagorie et le désir homme-femme ? Tout est désormais gratos, le paradis, enfin ! Mouais, le réel, le cru, le cochon mis en scène en HD... Téléchargement terminé ! Aucune menace active n’a été décelée : « welcome to you ! » Gravée dans mon cœur et rivé à son pieu, Marion, c’était d’abord pour l’escorting un prénom pratique à retenir. D’ailleurs, c’était le sien. Mais elle fut, en premier lieu, ma raison de vivre, seul proche. Sans ciller, sans préambule, elle les chopait tous ! Un à un, elle les alignait, les perforait, les « cartouchait » ! Elle visait entre les yeux, selon le climat, la tête du client ! Une mise à mort personnifiée top-étoile dans de la soie après les avoir lascivement choyés, soignés aux petits oignons... Me rappelle comme si c’était hier, comment c’était avec elle. Recompte encore tous ses consommateurs refroidis, sept ou huit macchabées, je ne sais plus trop...

Honte sur elle, sur moi, sur nous ? Quel mea culpa ? Vous pouvez vous le ficher où je pense, sodomites, messieurs les faux-culs de première ! Suis le seul rescapé de notre tandem, de tout ce carnage, merci ! Ineffaçable, sans équivalence, Marion était le feu de ma vie. Ai beau souffler sur les braises afin que celui-ci se rallume, rien n’y fera, en suis conscient mais personne ne pourra ni me couper la langue ni m’enlever les mots de la bouche ! Un passé pas si simple... Qu’on me pende, qu’on me cloue, Judas ! Demain, il me les faut toutes ! D’elle, que reste-t-il ? D’une beauté plastique des plus attirantes, à ses clients en pâmoison, en sa chambre des tortures, si flamboyante, si noire, elle leur accordait un dernier râle de plaisir intense puis plus rien, pas de pardon, pas de compréhension, pas de quartier ! Son goût pour le gore, je ne sais, toujours est-il que toutes ses doses mortelles faisaient aussitôt leur sinistre effet paralysant...

D’yeux d’un brun des plus pénétrants, sélective, presque toujours sapée de tailleurs dernier cri, souvent dans les tons tabac ou bordeaux, tentation, péché mortel, Marion savait mieux que personne lire toute sournoiserie sur n’importe quelle lèvre. Tranchante et impétueuse, la belle aventurière les avait entre ses reins, ses croches, tous furent à sa merci ! D’abord sans barrière, pacifiste, tendre et joyeuse, la jouissance charnelle se passait sous les meilleurs auspices, ensuite, disons que la fin des ébats s’apparentait quelquefois à une flagrante exécution en règle. Elle était incontrôlable. Gavé, le type était bon pour la casse. Pour parachever son œuvre, notre modus operandi, la Fossoyeuse se pointait au rendez-vous comme un soulagement pour sa proie, une vraie délivrance pour les deux parties d’ailleurs car, même après l’avoir dessoudé, la miss s’acharnait encore sur son Médor réduisant sa face à l’état de bouillie, « prends ça et encore ça, crevure ! ».

En ses jupons, par crainte de représailles ou de devoir par la suite supporter son silence ou ses savons, voire des ambiances plombées, au doigt, à l’œil, à la lettre, tout collé à sa maman pute de luxe, tout rompu à ses frasques comme à nos quatre cents coups en douce, je lui obéissais, cédais à tout, fallait pas cafouiller... Avec elle à Paris, possédant, « fashion », j’étais in, dans le vent... Remarquée ou se faisant remarquer, Marion-la-belladone déchirait ! Sur les Champs-Elysées, si souveraine, devenue tellement Parisienne, Marion allumait les mecs les mettant au pas, très à l’aise, sa seule présence ou ses tenues de soirée plus que vaporeuses, croyez-moi, suffisaient à ébranler la scène courante. On la sifflait et, pour leur grand malheur, tous leurs écus, tous leurs deniers, elle leur mettait le grappin dessus en s’offrant à ces vieux roquentins qui, pleins aux as, voulaient encore se payer une jeunette bien foutue. Mal leur en aura donc pris puisque certains y sont passés, vipère !

« Ce soir, mon pote, pas de popote, ni de chichis, on va chez les plus grands ! À la fosse les conséquences ! Ce soir, trésor, suis amoureuse de mon acolyte, ma « main forte » ! Tu sais, mon prince, tu n’es guère gros, le stress, la destinée qu’on mène, cette spirale infernale, toute cette merde, n’est-ce pas ? Faut bien becter, être vaillant et il te faut de la meilleure cuisine. Aboule ! Paris nous attend ! » Vinaigre, flattant votre ego quand vous étiez avec elle, Marion, véritable anguille, n’avait rien à voir avec cette tripotée de filles fessues ou « ventouseuses » qui, bêtasses, vêtues de noir et de lingeries érotiques douteuses, font le trottoir ni avec celles exposées à l’étalage des vitrines appartenant à ces voyoucraties, maîtres chanteurs, vassaux de banlieue baratineurs ou autres charcutiers proxo-étatiques qui, « césaristes » et véritables snipers, n’ont de cesse de décomposer, de dépecer des porcs citadins en rut permanent.

En aucune façon comparable, continuai-je, non plus à toutes ces gaupes, fleurs de macadam, merluches, bécasses, viragos, moukères et autres tiédasses, nymphos ou cassantes glacées à souhait aux figures d’anges, mais toutes des shérifs, voire encore à cette nouvelle moisson de grassouillettes bande-mou au blue-jeans serrant qui, à force, ne nous excitent même plus, d’un moche, beurk ! À telle enseigne que la passe est devenue tellement brève, pathétiquement dégueulassée, sans relief ou cousue de fil blanc, comme sur l’écran froid d’un PC, que cela en est devenu bien lassant ; l’abondance tuant le désir, nous somme-t-on. Restons-en là ?

Rebelle à sa manière, la belle sirène, Marion les coiffait toutes ! Au-dessus de la concurrence, elle était nullement comme ces trémoussantes entraîneuses aux vénalités affichées, ces étourdissantes aux faveurs déconcertantes si déraisonnables, rieuses sur commande et toujours prêtes à recommencer pour des pépettes, ces indécentes nombrilo-contemplatives, ces bourrées chiennasses aspergées de foutre, authentiques garages à bites qui, vaginales ou clitoridiennes, font n’importe quoi avec n’importe qui, ces hautaines pestes si dégourdies, si fières de leur beauté éphémère ou ces petites roulasses arnaqueuses à la pelle plus branques les unes que les autres que l’on ramasse... Non, Marion était toute différente, inégalable. Leur étant naturellement et mille fois supérieure, le haut de gamme ! la demoiselle n’était certainement pas de la trempe de cette brassée de caquettes immodestes déodorisées et ollé-ollé qui, sans fantaisie aucune, vous repoussent après l’heure tarifée parlant chiffons plutôt que d’amour. Toutes ces semi-pros Adrienne, Lola, Rébecca, Alysson, Virginie, Tanutscha, Sharone, Ira et autres amazones éhontées coureuses du Net esthétiquement attrayantes certes, mais des plus morveuses, tricheuses et menteuses, enfin pourries de l’intérieur, puissé-je le formuler ?

Ni encore moins comme cette poignée de banquises étendues de tout leur long aux jambes interminables et épilées, ces jouvencelles pour mariniers au regard cocker qui tendent lèvres, sexe et bras au premier matelot venu, ces caillettes merdeuses au look débile, ces échangistes rouge aux lippes, ces vieilles cupides qui couchottent, ces gourdes MILF saturées de mondanités et de « mielleuseries », ces cougars ou plies séchées pomponnées comme jamais, ces quadragénaires matures sans fard, ces femmes de cafés charnues ou de débit de vinasses, vulgaires à en rougir d’embarras, ces performeuses bisexuelles pipeuses à la chaîne stylées au sourire ravageur comme les hyper-bonnes Tabatha Cash, Anja Juliette Laval ou Cecilia Vega, et j’en passe, fou ! ces vidangeuses de tous les recoins, ces « money-girls » tchèques, ces orgueilleuses fières de leur popotin, ces salopes dans l’âme lèche-bites, ces cliniciennes vespérales paillardes bonnet C ou D aux tenues plus que voyantes, ces cabaretières peu affables aux gros nichons lourds en lait, ces Berlinoises aux imposantes poitrines siliconées, ces « bochiennes » fans des triolismes en cuir noir SM et chatte rasée, ces adeptes du « toilet slave », des tournantes, des « bukkake », ces croque-messieurs montreuses d’anatomies aux abbayes des s’offre-à-tous, ces call-girls sangsues de la haute ou encore ces autres accueillantes, extraverties et enveloppantes frangines déguenillées, ces dégorgeuses à la cuisse légère, ces dissimulatrices aux petits dessous prometteurs, ces amatrices de « gonzos » accortes pour tout, surtout si il y a des gains confortables à la clé, chacune ayant sa spécialité propre ! Mémère, j’dégueule le tout dans le plastic Super U !

M’emporte, m’éponge, me relaxe. Ajoutons à ce palmarès atterrant, tous genres confondus, un défilé incalculable de bombasses, superbes « kinky teen babes », beurettes non en hijab mais dont certaines parties du corps sont enluminées de henné, harpies, gothiques ou clownesses grues ayant recours au botox, chaudes latines, techniciennes massothérapeutes du sexe, virtuoses du crac-crac ou autant d’insatisfaites bourges, rondelettes, playmates, reines de beauté mais de toutes les fornications, blondasses exhibitionnistes pompettes la moitié du temps que de rêches, mal lunées ou cotonneuses petites pervenches, « pralineuses » ou comploteuses chercheuses de poux aux yeux de langouste, adorables turfeuses aux culs dodus, aux seins naturellement harmonieux, aux jolis minous, cons et minois certes, mais qui n’ont visiblement pas inventé l’eau chaude ! Et, enfin, que dire de toutes ces femmes mariées délaissées en mal d’affect rêvant d’as de la gonflette et de lionceaux « toys boys » ou autres accompagnatrices théâtreuses, riantes et suceuses sur commande gainées de fins nylons qui, contraintes à aspirer à soulager des sexes, ne savent même plus nous faire chavirer ni nous mener au septième ciel ni, comme c’est fâcheux, nous faire bander, jouir ou venir tout simplement ? Et elles alors ?

Au secours ! Au secours ! S’agirait-il tour à tour d’un sentiment de mésaise, d’un serrement cardiaque ou d’une acidité qui se corserait tel un brûlant qui n’arrêterait plus de vous comprimer, comme un mord qui vous pincerait, un coupant qui continuerait à s’enfoncer en vous ? Fi donc ! De toute façon, dans ces conditions si rebutantes, aucune lueur sympa d’échange sensuel ni aucune décharge émotionnelle au cœur même du rapport physique ne risqueraient de se pointer, croyez-le bien ! Non, mon pote, vraiment, c’est bath ! Et qu’est-ce qu’on se tape parfois comme glaçons, meufs au regard vachard, gnangnans ou petits boudins ! Cela se voit-il lorsqu’on a bien pris son pied ? L’été a l’air par ici de s’enfuir... Déjà à l’école, les minets couraient après Marion, sujet aux fantasmes les plus foldingues, c’est que cette princesse fut si prisée, une étoile filante était née ! Des jeunes coqs tournillaient toujours autour d’elle pour violer son abricot rasé, même les puceaux se battaient pour cette précoce aux allures de fillette si angélique, pour palper ses deux mandarines, pour l’avoir ! Faut avouer aussi que ces blancs-becs, elle les embrassait incorrectement, comme personne ! Marion...

Déjà là, elle sut qu’elle serait une manipulatrice hors pair, une si perverse, si sulfureuse salope, oui ! Sa réputation ne fit alors qu’un tour, la jalousie féminine envers elle y allant bon train. Surtout qu’il se papotait qu’elle voulait bien en dehors des cours branler leurs queues mais ne voulait en aucun cas les pomper ou coucher avec, pas question ! L’histoire ne nous dira pas non plus si elle se faisait déjà dédommager pour ses services. Pense que oui. Bien évidemment que oui. Suis-je donc à ce point naïf ? Mon amour pour elle me met à chaque fois le doigt dans l’œil... Déjà là, pas faux, qui d’autre qu’elle pouvait mener ces minus, ces pignoufs par la braguette, le bout du nez si ce n’était pour son argent de poche ? Du haut de ses seize ans, ce bel et craquant ange brun les dominait, les fumait déjà bien que la Marion d’alors désirait rester vierge pour accueillir comme au cinéma le vrai grand Amour, « Le prince charmant avec de belles dents blanches », répétait-elle... « Celui qui... » Trou-la-la ! Ce qu’on est stupide encore à cet âge-là, on a le cœur adolescent bouffi d’évasions et de rêves alors que la vie tout simplement choisit toujours pour nous tout autrement...

Ce à quoi on aspire ? On a fait taire, j’imagine, le poète ? Furieusement, veux chasser de ma cervelle cette petite frappe de Francis, pas Marion ! « Se le faire », chuchotait-elle, son preneur, n’était rien pour elle, la routine... « Ces gugusses triés sur le volet par ta vigilance, mon grand garçon, je les liquide à l’automatique, chose facile, déclic ! Pouf ! Pouf ! Zozo zigouillé ! Prendre, jouir puis mourir, il n’y a pas de plus belle mort, vieille branche ! En arrive même à ne plus discerner les vraies choses... » N’en suis pas si convaincu, même la pire des putains a tout de même du ressentiment, non ? Moi, sais bien que j’aurais vomi sur place tout mon quatre heures ! Ne suis pas fait pour buter des gens. Elle, c’était le cas ! Si mou, tout paf, tout couillon, n’ai jamais eu ni sa trempe ni son courage car il faut en avoir, croyez-moi, pour occire quelqu’un comme pour mettre fin à ses jours d’ailleurs. Tout cela a été, ce n’était pas du ciné !

Un beau numéro, cette soufflante jeune femme, un je-ne-sais-quoi en plus, rien à voir non plus avec cette sulfureuse jeune Zahia, « fiancée » à certains Bleus footeux queutards friqués... Marion avait en elle cette pure discipline, cette insoumission avec tout de même, en contrepartie, cœur et poumons atrophiés, une véritable envie de bien goberger. De sa jeunesse, droguée, elle en a également bien profitée. Elle s’éclatait grave. Savait-elle avant tout le monde que le temps pour elle dans ces jeux d’Éros et de Thanatos lui était compté ? Sans notre rencontre, et bien qu’elle ait provoqué ma culbute, quelle autre trajectoire ma vie aurait-elle pris ?

D’allure mannequin, d’une taille moyenne mais de guêpe, fort lucide dès son plus jeune âge de sa prédominance, de son éclat, faite de haut en bas de cette élégance brunie, ni bête, ni poule mouillée, possédant en sus le don naturel de la manigance, titrée ou non, elle était totalement sans tabou adoptant son vocabulaire selon les hautes classes sociales qu’elle fréquentait. Pas d’hésitation, elle savait y faire avec le beau linge, le mecton, les ploutocrates, les messieurs collets-montés-cravates, à Monaco, Paris ou Dubaï, dans les paradis fiscaux ou ailleurs...

Pris de transes, c’est plus que fréquent, à la nuit tombée, dansent sur moi la belle, tant son ombre, feu follette, que tous ces revenants, tous ses clients grimaçants dans leurs blanchissantes pelisses... Elle tout comme ses esclaves, tous et tous recommencent à courir le long de mes plafonds... Après cette incroyable sarabande mortuaire, ses sept cadavres, oui, voilà, ils étaient sept, je la revois si distinguée, si céleste s’avancer, s’asseoir sur mon grand lit. Faisant mine de me rassurer, elle se dénude, m’allume puis me possède. Chaque soir, sèche au bec, c’est pareil au même, trempé, je ne dors plus. Insomniaque, je l’attends. C’est que Marion respire encore et toujours en moi. Comme un feu qui ne s’étouffera jamais.

 

2
 

Guili-guili ! Qu’avons-nous encore à nous dire, à partager ? Quels sont les nouveaux rapports homme-femme ? Sommes-nous tous devenus des copies conformes ? Chacun son destin ? Avons-nous fait le tour des choses, de la question ? La lutte est-elle cet acte de devoir abattre l’autre ? On se trouve bien en 2011 devant le déclin du Mâle dominant. Tout est dans la féminisation aujourd’hui, il y a trop de tout et, mesdames, je ne crois plus au Père Noël ! L’utopie, quand elle se réalise, amplifie à l’infini les petits enfers... Bruxelles, à cran, se lit par avance. M’y encroûte, m’y pérégrine, ne m’y perds rarement, rues et quartiers de cette capitale « plurielle » me sont archiconnus, tintamarre coutumier ! Me contrebande, sautille et carbure aux innombrables bières de curés, bedaine gonflée ! Tout s’espionne alors qu’on a besoin de secret, la transparence est un cauchemar, mais bon, dans ma tour d’ivoire, sans déconner, un peu de lumière sur mon cœur-queue !

Ce dernier se fait alors si défaillant, si lourd qu’au fond cette bonne odeur de légèreté que voilà, je ne pourrais m’empêcher de l’inhaler. Dès lors, la chaleur me vient si vite aux joues comme une eau-de-vie supérieure à 20 degrés qui, trop forte, vous cramerait l’épiderme, vous prenant directement à la gorge que le contraste en est plus que saisissant. Et me reviennent bien souvent en mémoire, par pans, les vers de ce révolutionnaire surréaliste qu’était Benjamin Péret, « je suis fauteur voilà ma gloire, mon espérance est dans ma main, je suis le plus grand fauteur de l’Histoire, je décharge sur ton chien ! »

Comme à chaque fois, on cherche perpétuellement quelque chose à révéler et n’était-ce pour tous les actes criminels que Marion, de concert avec moi, aura commis, restant un meurtrier aux yeux des parties civiles, ce que je peux comprendre mais non admettre, ai fait amende honorable, un travail sur moi-même. Un autre homme ? Or, il me reste quelques traces, une perforante et étrange douleur au poitrail. L’acide remonte. Sa mort m’aura éclipsé, Marion était ma dynamo... Ainsi, tout bigarré, faune, je déboule et m’encombre moi-même ! Alors, pour fuir tous ces gris qui nous saoulent, on se créée d’autres itinéraires où on se fait tant vaporeux que volage mais où l’on perd très rapidement assurance... Comme cette lente autodestruction entre les jambes des putes, rien d’exceptionnel, me direz-vous, un long suicide, du déjà vu, du déjà vécu...

Deux ans, jour pour jour, se seront donc écoulés depuis mon incarcération en maison d’arrêt à Fresnes, banlieue sud de Paris. C’est là dans une de ces cellules modernes mais gueulardes qu’écroué, ai purgé pénitence, lavé ma conscience... La taule change l’être... Mouais, suppliais pour ne pas être rapatrié au Royaume avec la justice belge en action, son peu de crédibilité, assez douteuse, assez laxiste, trop craignos ! Alors l’extradition, pff ! cela ne m’emballait guère. En même temps, les amigos, les cellules misérabilistes d’ici, ça craint, bon pour les rats ! Il y a l’insalubrité carcérale, les gardiens et la piétaille mal rémunérés, leur petite commission, l’achat de leur silence, la neige qui s’y infiltre à la dérobée, la corde raide, ouais ! Voyais d’ici le topo ! Patrie des droits de l’homme, hem, hem, la douce France a finalement accepté de me garder au chaud, y étais somme toute mieux encadré, fallait pas plus.