1.
Kerry regarda le bâtonnet blanc dans sa main tremblante. Positif… Son cœur se gonfla de joie. Elle était enceinte !
Ce n’était pas prévu. Elle n’avait fait le test que par acquit de conscience, persuadée qu’il serait négatif. C’était une merveilleuse surprise ! Un bébé…
Elle se mordit la lèvre. Certes, la perspective d’avoir un enfant était exaltante. Mais un peu angoissante également, il fallait bien le reconnaître.
Comment Théo allait-il réagir ? Nul doute qu’il ne s’attendait pas lui non plus à un tel bouleversement…
Il y avait seulement six mois qu’elle vivait avec Théo Diakos, l’un des promoteurs immobiliers les plus riches d’Athènes. Il la traitait comme une princesse et elle avait été chaleureusement accueillie au sein de la famille par le frère de Théo, Corban, et femme de celui-ci, Hallie, qui habitaient l’appartement voisin.
Cependant, si elle n’avait aucun doute sur les sentiments qu’elle éprouvait pour lui, elle n’avait pas la certitude absolue qu’ils étaient partagés. Ils n’avaient jamais parlé d’amour. Jamais non plus ils n’avaient fait de projets d’avenir.
Ils vivaient comme dans un conte de fées, mais au jour le jour.
Calant ses longs cheveux blonds derrière ses oreilles, Kerry rangea le test et sortit sur la terrasse, transformée en véritable jardin. Lorsque Théo et elle se trouvaient à Athènes, cette oasis de verdure au charme magique était son endroit favori.
Enveloppée par un parfum subtil, elle admira les rosiers grimpants tout en savourant le chant mélodieux de la fontaine. Quel calme délicieux ! Au milieu de cette profusion d’arbres et de plantes, il était difficile d’imaginer l’agitation qui régnait au pied de l’immeuble.
Ce havre de paix était perché sur le toit d’un luxueux palace — le plus beau fleuron de l’empire immobilier de Théo Diakos — situé en plein cœur de la ville.
La nuit commençait à tomber. Sur l’Acropole, le Parthénon éclairé, superbe et majestueux, se découpait sur le ciel. C’était un spectacle extraordinaire dont elle ne se lasserait jamais. Tout comme elle ne se lasserait jamais de vivre avec Théo… D’aussi loin que remontaient ses souvenirs, c’était la première fois qu’elle se sentait chez elle quelque part.
Au début elle avait eu du mal à croire qu’un homme aussi séduisant et sophistiqué puisse s’intéresser à quelqu’un comme elle, mais la passion toujours renouvelée qu’il lui témoignait avait fini par balayer ses doutes.
A vingt-trois ans, elle était heureuse pour la première fois de sa vie. Ses souvenirs douloureux s’étaient estompés peu à peu, et aujourd’hui elle se sentait enfin libérée de son passé. Même s’il ne lui avait jamais fait de serments d’amour, Théo tenait à elle. Il avait choisi de la garder auprès de lui. Pour elle, c’était une expérience toute nouvelle. Un cadeau inespéré.
Et elle avait bien l’intention d’offrir le même cadeau à son bébé dès sa naissance.
Envahie par une émotion indicible, elle posa les mains sur son ventre. Dire qu’elle portait l’enfant de Théo ! Elle avait encore un peu de mal à y croire. Mais une chose était certaine : son bébé se sentirait toujours désiré. Toujours aimé. Quoi qu’il arrive.
Un frisson d’excitation la parcourut. Il n’y avait aucune raison de craindre la réaction de Théo. Il serait aussi heureux qu’elle. N’était-il pas un oncle fantastique ? Il adorait son neveu Nicco et ce dernier le lui rendait bien. Oui, pas de doute, il serait le meilleur des pères.
Impossible d’attendre plus longtemps ! Il fallait absolument qu’elle lui annonce la nouvelle.
Kerry rentra dans l’appartement et gagna en courant le bureau de Théo. Comme elle avait hâte de voir son visage s’illuminer quand il apprendrait qu’il allait devenir papa !
Arrivée à proximité de la porte, elle s’immobilisa. Apparemment, Théo était en grande discussion avec son frère. Ce n’était pas le moment de le déranger… Tant pis, il faudrait attendre encore un peu avant de partager sa joie avec lui.
S'efforçant de surmonter sa déception, elle s’apprêtait à faire demi-tour lorsqu’une phrase de Théo la fit tressaillir. Ecouter aux portes n’était pas dans ses habitudes et elle ne parlait pas encore le grec couramment. Cependant, cela ne l’empêchait pas de comprendre les propos des deux hommes.